Les Manuscrits des Écritures Grecques

 

Introduction

Les 27 livres canoniques des Écritures grecques ont été rédigés en grec koinè (le grec commun de l’époque). Cependant le livre de Matthieu a d’abord été écrit en hébreu biblique à l’intention des Juifs. C’est ce qu’affirme Jérôme, traducteur de la Bible du IVème siècle, ainsi que Papias, chrétien et historien du début du 2ème siècle. Matthieu a probablement fait sa propre traduction, car en effet, en tant qu'ancien fonctionnaire au service des Romains comme collecteur d’impôts, il connaissait certainement l’hébreu, le latin et le grec (Marc 2:14-17). Marc, Luc, Jean, Paul, Pierre, Jacques et Jude, autres rédacteurs chrétiens de la Bible, ont tous écrit en grec koinè, langue commune et vivante comprise par les chrétiens et la plupart des autres peuples du Ier siècle. Le dernier document originel est de Jean (vers 98 de n. è.).

De l'avis général l'évangile de Jean a été écrit vers l'an 98, après son retour d'exil sur l'île de Patmos (Rév 1:9). L'empereur romain Nerva (96-98) rappela beaucoup de ceux qui avaient été exilés vers la fin du règne de Domitien, et c'est à Éphèse dans la troisième année de Trajan, que Jean s'éteindra . Les épîtres d'Ignace d'Antioche (vers 110) dénote indiscutablement l'utilisation de l'évangile de Jean. 

Selon la tradition, Jean aurait été libéré et serait revenu d’exil après la mort de Domitien, et il serait mort à Éphèse vers la fin du Ier siècle ( The Ante-Nicene Fathers, vol. VIII, p. 562, "Acts of the Holy Apostle and Evangelist John the Theologian").

Nous avons en notre possession aujourd’hui une réserve de plus de 13 000 copies manuscrites des 27 livres canoniques. Certaines couvrent de larges portions des Écritures, d’autres n'en sont que des fragments. On a estimé à plus de 5 000 le nombre de manuscrits dans le grec originel. De plus, il existe plus de 8 000 manuscrits en diverses autres langues. S’échelonnant du IIème au XVIème siècle de n. è., tous sont une aide précieuse pour établir le texte originel authentique. Le plus ancien de ces nombreux manuscrits est un fragment sur papyrus de l’Évangile selon Jean, connu sous le numéro international P52, qui est daté de la première moitié du IIème siècle, probablement vers 125 de n. è. ; il se trouve à la Bibliothèque John Rylands à Manchester (Angleterre).

Dans la province du Fayoum, en Égypte, on a découvert quantité d’écrits sur papyrus. Vers la fin du XIXème siècle, un certain nombre de papyrus bibliques ont été mis au jour. L’une des plus importantes découvertes de manuscrits de notre temps a été rendue publique en 1931. Il s’agissait de 11 fragments de codex renfermant, en grec, des parties de 8 livres des Écritures hébraïques inspirées et de 15 livres des Écritures grecques chrétiennes. La rédaction de ces papyrus se situe entre le IIème et le IVème siècle de n. è. La plupart des fragments des Écritures grecques chrétiennes ainsi découverts font aujourd’hui partie des collections Chester Beatty sous les références P45, P46 et P47 (la lettre P étant la lettre symbole pour "papyrus"). Des papyrus appartenant à une autre collection remarquable ont été publiés à Genève (Suisse) de 1956 à 1961. Connus sous le nom de Bodmer, ces papyrus contiennent les premiers textes de deux Évangiles (P66 et P75) datant du début du IIIème siècle de n.è. .

Les découvertes de ces papyrus sont la preuve que le canon de la Bible fut achevé très tôt. Parmi les papyrus Chester Beatty, deux codex — l’un (P45) reliant ensemble des fragments des quatre Évangiles et les Actes, l’autre (P46) réunissant en un seul codex 9 des 14 lettres de Paul — montrent que les Écritures grecques chrétiennes inspirées ont été compilées peu de temps après la mort des apôtres. Comme il a fallu du temps pour que ces codex connaissent une large diffusion jusqu’en Égypte, il apparaît que ces Écritures avaient été compilées dans leur forme courante dès le IIème siècle au plus tard. Ainsi, il ne fait pas de doute qu’à la fin du IIème siècle le canon des Écritures grecques chrétiennes était achevé, complétant le canon de la Bible tout entière. Retour haut de page

 

Préservation des écritures grecques

Depuis quelques siècles, on utilisait en effet des rouleaux pour la rédaction des oeuvres littéraires, c'est-à-dire de grands rouleaux qui pouvaient atteindre six à neuf mètres de long et vingt-trois à vingt-cinq centimètres de large. Des feuillets, faits de peau ou de papyrus, cousus les uns à la suite des autres, constituaient ainsi un «rouleau du livre» (Ps. 40: 7). On écrivait le texte en colonnes, lesquelles tenaient lieu de pages (Jér 36: 23). Même notre mot « volume », dérivé du latin volumen, signifiait "chose enroulée autour de un ou de deux cylindres-bâtons". Le codex connut peu à peu un tel succès qu'il finit par évincer le rouleau.

Les Écritures hébraïques avaient été rédigées sur parchemin ou peau. L'histoire montre, en effet, que la version des Septante a été faite sur la base de copies sur peau, envoyées à Alexandrie d'Égypte (le parchemin a été utilisé dès 1500 av. J.-C). Le livre d'Isaïe, dont Jésus fit la lecture dans la synagogue de Nazareth, ville où il avait grandi, était sans aucun doute fait de peau, de même que le rouleau d’Isaïe et la plupart des autres manuscrits de la mer Morte découverts en 1947 (Luc 4 :17). Quant à l'encre, c'était un mélange fait de suie et de gomme, conservé à l'état solide. Le copiste la délayait à l'eau à mesure qu'il en avait besoin. Sa plume, appelée un calame, était une simple tige de roseau dont une des extrémités, ramollie dans de l'eau, ressemblait plutôt à un fin pinceau (Jér 36: 23; 2 Cor 3: 3; Il Jean 12; III Jean 13).

Mais de tels rouleaux de peau étaient encombrants et revenaient très cher de surcroît. Dans leur ministère, les chrétiens avaient besoin d'un matériau plus pratique à tous égards. Retour haut de page

 

Le Codex facilite la préservation et la divulgation des écritures

Qu'est-ce qu'un codex? On appelait «caudex » le tronc d'un arbre: c'est ce terme, modifié, qui a été appliqué à des tablettes de bois enserrées dans un cadre en relief. Celles-ci étaient souvent enduites d'une couche de cire, sur laquelle on traçait les mots au moyen d'un stylet, comme le fait l'écolier sur son ardoise (Es. 8: 1). Vers le Vème siècle avant notre ère, on utilisait des tablettes composées de plusieurs feuilles attachées les unes aux autres au moyen de lanières passées dans des trous. Et parce que ces tablettes une fois assemblées évoquaient un tronc d'arbre, elles reçurent le nom de codex.

Comme il devait être désagréable de se déplacer avec des tablettes de bois aussi volumineuses. On s’est mis à la recherche d'un matériau plus léger et plus souple. Les Romains généralisèrent l'emploi du calepin de parchemin qui remplaça les tablettes avant d'être supplanté, à son tour, par le codex proprement dit. D'abord, on ne sut pas très bien quel nom donner à ce nouveau support d'aspect inconnu et fait d'un matériau nouveau. Mais peu à peu on en vint à l'appeler membranoe en latin, c’est-à-dire "calepin de parchemin". L'apôtre Paul employa ce mot lorsqu'il demanda à Timothée de lui apporter «les livres, surtout les parchemins [membranes] » (2 Tim 4:13). Si Paul employa en grec un mot latin qui avait gardé son sens premier, c'est bien parce qu'aucun mot équivalent n'existait en grec pour indiquer ce dont il avait besoin. Par la suite, la langue grecque emprunta encore au latin le mot «codex» pour désigner le livre.

Grâce à la générosité des sables bienveillants de l'Égypte, nous voyons à présent les choses sous un jour bien plus juste. Les découvertes faites au cours de ces soixante dernières années ont apporté tant de preuves, surtout celles provenant des décharges publiques de l'ancienne ville d'Oxyrhynchus et de l'ancien Fayoum, qu'elles comblent pratiquement l'intervalle des trois premiers siècles de notre ère et nous permettent ainsi de mieux comprendre le rôle joué par le codex en papyrus.

Un fait intéressant à noter, c'est que parmi les manuscrits de la Bible datant de l'ère chrétienne, presque tous se présentent sous forme de codex en papyrus, ce qui explique cette constatation: « Alors que les écrits classiques circulaient longtemps encore sous forme de rouleaux, le codex semblait surtout convenir aux écrits chrétiens» (Here and there among the Papyri, de G.Milligan).  Une étude sur la littérature païenne, publiée récemment, montre en effet qu'à peine 2,4 pour cent des écrits se présentaient, au IIIème siècle, sous forme de codex (11 codex contre 465 rouleaux). En revanche, tous les manuscrits de la Bible que les savants ont datés du IIIème siècle sont des codex, à une exception près: un ancien manuscrit des Psaumes, sous forme de rouleau, qui doit avoir appartenu à des chrétiens. Retour haut de page

 

Confection d’un Codex

Il semble que pour confectionner un codex, on se soit contenté, à l'origine, d'empiler les feuillets puis de les plier tous en une seule fois. n fragment, connu sous le nom de P5, se compose de deux feuilles seulement dont l'une contient une partie de Jean 1 et l'autre Jean 20.

Ainsi, avec les autres chapitres venant s'intercaler entre ces deux feuilles, le codex entier devait former un seul cahier de 50 feuilles. Le codex d'Isaïe de la collection de Chester Beatty, était primitivement un cahier unique de 112 feuilles. Dans ces codex, les feuilles du milieu étaient souvent rognées pour éviter qu'elles ne dépassent une fois l'ouvrage fermé; aussi les colonnes d'écriture étaient-elles plus étroites sur les pages du milieu que sur celles du début et de la fin. Parmi les premiers codex, certains furent cependant confectionnés selon un procédé tout à fait différent: on plaçait les uns sur les autres des cahiers qui ne comprenaient qu'un seul feuillet plié en deux, avant de les coudre ensemble. Ni l'un ni l'autre de ces deux procédés ne réussit à s'imposer. Les cahiers comptant quatre ou cinq feuillets (soit huit ou dix feuilles) se révélèrent plus pratiques.
 

Certains codex sont toutefois mixtes, par exemple le codex Bodmer Jean P66. Sur cinq cahiers parvenus jusqu'à nous, trois ont cinq feuillets chacun, tandis que l'un en a quatre et le dernier, huit. Le chapitre six manquant devait donc figurer dans un cahier formé d'un seul feuillet.

Les différentes méthodes employées pour la disposition des feuillets dénotent probablement une préférence personnelle. Chaque feuillet était formé de deux couches de fibres de papyrus collées ensemble, la première dans le sens horizontal et l'autre dans le sens vertical. Le côté comportant les fibres horizontales est appelé le recto et celui comportant les fibres verticales, le verso. En raison même de la méthode utilisée pour la disposition des feuilles, un codex ouvert pouvait se présenter de différentes façons: une page recto pouvait faire face à une page verso ou vice versa, ou encore des pages pouvaient se trouver recto contre recto ou verso contre verso.

Si dans certains codex anciens chaque page porte deux colonnes étroites de texte, c'est probablement parce que l'on a recopié des rouleaux en décalant le moins possible la disposition originale du texte. Mais le contraire pouvait aussi se produire. Ainsi, après avoir acquis un vieux rouleau contenant un épitomé de Tite-Live, un chrétien économe le retourna pour transcrire sur le verso l'épître aux Hébreux si soigneusement d'après un codex qu'il y reporta même le numéro des pages. Un tel rouleau, couvert d'écriture au verso comme au recto, s'appelle un opisthographe. Retour haut de page

 

Pourquoi le Codex fut-il adopté

Pourquoi en vint-on à préférer le codex au rouleau, dont l'emploi était pourtant si répandu et si courant? Au début, il n'était pas question d'acheter des codex, car personne n'en faisait le commerce. Si l'on a retrouvé des codex confectionnés avec des rouleaux découpés, c'est que ces toutes premières tentatives étaient dues à des raisons bien précises. Le fait de réunir en un seul codex les quatre Évangiles était incontestablement un avantage. Par contre, il n'aurait pas été pratique d'en faire un seul rouleau, car celui de Matthieu mesurait environ 9,15 m à lui seul, celui de Marc environ 5,80 m, celui de Luc environ 9,45 m et celui de Jean environ 7,30 m, soit au total environ 31,70 m. Ainsi, le codex Chester Beatty, datant du IIIème siècle, qui contient les Évangiles et les Actes aurait demandé cinq rouleaux, tandis qu'il aurait fallu trois rouleaux pour celui contenant les Nombres et le Deutéronome.

Les premiers chrétiens, qui se servaient continuellement des Écritures, s'aperçurent très tôt que dans un codex les passages désirés se retrouvaient beaucoup plus facilement que dans un rouleau. Même des codex de poche ont été découverts, dont le plus petit (IIIème siècle de notre ère, Psaume 2) renferme des pages d'environ 7,6 cm sur 5 cm, avec douze lignes de texte. On comprit donc très vite l’avantage d'un format plus facile à consulter. En fin de compte, le codex revenait moins cher, parce qu'on utilisait les deux côtés des feuilles de papyrus.

Un autre avantage des codex, c'est qu'ils permettaient de mieux conserver les livres inspirés. Encore de nos jours, les codex sont là pour témoigner de la composition du canon biblique. Ainsi, puisque l'on a retrouvé un codex (Chester Beatty P46) contenant neuf des épîtres de Paul dont celle adressée aux Hébreux, il est permis d'en déduire que cette dernière était reçue au même titre que les autres épîtres de Paul. C'est parce que le codex réunissait en un seul volume les divers écrits inspirés qu'il était très difficile d'y introduire des écrits profanes. Le fait même que la version des Septante n’a pas tardé à passer du rouleau au codex prouve que les premiers chrétiens se servaient fréquemment de cette version des Écritures hébraïques et que celle-ci n'était en rien considérée comme inférieure aux nouveaux écrits.

Si, au IIème siècle, les milieux chrétiens se servaient presque exclusivement du codex (et cela même pour la version des Septante), c'est que le codex a dû être adopté déjà au Ier siècle de notre ère. Cela expliquerait la perte de la finale de l'évangile de Marc, car la dernière page d’un codex pouvait se perdre plus facilement que le dernier bout d'un rouleau. Celui-ci se trouvant normalement à l'intérieur, c'est le début du rouleau qui s'abîmait. Cette idée est corroborée par le fait que dans les rouleaux retrouvés les parties terminales sont beaucoup plus nombreuses que les débuts.

Pouvons-nous, à présent, comprendre de quelle façon les Écritures grecques chrétiennes ont pris forme? Que savons-nous de Matthieu, d'abord collecteur d'impôts, puis auteur du premier Évangile? «Il passait la plus grande partie de la journée la plume à la main. Pourquoi alors supposer qu'il a renoncé à son habitude d'écrire dès le moment qu'il a quitté son métier pour se vouer à une cause qui lui semblait revêtir un intérêt bien plus grand ?» (The Growth of the Gospels, par sir W.M Flinders Petrie). Voilà la question que pose l'auteur d'un récit sur les origines des Évangiles. Matthieu a probablement commencé par recueillir ses notes dans un calepin de parchemin, mais l'Évangile terminé circulait sous forme de calepin mis au net, puis sous forme de codex.

Les autres Évangiles furent joints à celui de Matthieu à mesure qu'ils étaient terminés. La demande de copies augmentant sans cesse, on tâchait d'utiliser le codex dans toute la mesure du possible, car les copies des Évangiles se répandaient partout. Vu la commodité du codex, on peut supposer que des ministres itinérants tels que Paul, Timothée et Tite en possédaient des éditions de poche. En rendant visite aux assemblées, ces ministres ne manquaient certainement pas de féliciter les frères qui s'efforçaient d'employer les codex nouvellement reçus, sans oublier pour autant d'encourager ceux qui utilisaient encore des rouleaux.

Le codex du IIème siècle apporte trois enseignements essentiels: en comblant presque entièrement le vide entre l'époque des apôtres et les manuscrits les plus anciens connus à ce jour, il confirme l’authenticité de la Parole de Dieu. Il révèle combien était ardent le désir des premiers chrétiens d'assurer aux Écritures la plus large diffusion possible et de réduire le prix assez élevé des livres, afin de permettre à chacun de lire les précieuses Paroles de vie. Enfin, il nous apprend à quel point les premiers chrétiens se servaient de leurs copies des Écritures, dont ils désiraient retrouver les pages aussi vite et aussi facilement que possible. Mettons autant d'empressement qu'eux à consulter la Bible. Lisons-la et étudions-la avec soin pour être mieux à même de démontrer quelle est la vraie foi (Eph 4:4-6), à l'exemple des chrétiens de l'ancienne ville de Bérée (Actes 17: 11). Retour haut de page

 

Consciencieux quoique sans formation professionnelle

Les historiens ont tendance à parler avec un certain mépris des oeuvres laissées par les copistes chrétiens primitifs. Ils font valoir que les copistes, par manque de précision, firent de nombreuses fautes que les savants se seraient de tout temps appliqués à redresser. Mais ce sont là des remarques qui donnent une impression complètement fausse. Le but de la transcription "est de reproduire de façon précise une série de mots donnés dans un ordre donné" et pour cela il faut "admettre que le devoir d'un transcripteur est de transcrire et rien de plus".

Cette "faculté", est plus rare qu'on ne pourrait le supposer et dépend surtout de la formation reçue, car, à moins que n'intervienne "une concentration toute spéciale du regard sur le langage auquel on prête une valeur sacrée intrinsèque (... ) l'intuition naturelle joue un rôle important dans le résultat". En d'autres termes, un copiste sans formation spéciale aura beau être très consciencieux, des fautes légères se glisseront dans son oeuvre parce qu'il se sera concentré davantage sur le sens que sur les mots exacts, la plupart des fautes étant imputables au subconscient.

Les autorités en matière de critique des textes signalent avoir constaté que même les éditions imprimées avec plusieurs siècles d'intervalle peuvent varier de façon considérable. Ils font aussi remarquer que peu de temps avant l'ère chrétienne, quand l'usage des livres (rouleaux) se généralisa en Grèce, on se plaignait constamment des défectuosités et des inexactitudes, inhérentes aux ouvrages des scribes professionnels.

Ainsi donc, les copistes chrétiens des premiers siècles commirent de nombreuses erreurs en raison de leur manque de formation professionnelle. Mais ces erreurs étaient-elles graves? Elles se limitent à des transpositions peu importantes de mots ou de tournures, à l'emploi de synonymes tels que "Seigneur" à la place de "Dieu" ou du pronom "il" à la place du nom propre "Jésus" et vice versa, s'il ne s'agit pas d'une variante orthographique ou d'une faute d'orthographe. En fait, Westcott et Hort déclarent eux-mêmes que 99,9 pour cent des différences dont il peut être question, ne sont que des "variantes relativement insignifiantes".

Le papyrus grec Rylands 457 (P52), date de la 1ère moitié du deuxième siècle. Il est le plus ancien fragment des Écritures grecques chrétiennes existant de nos jours (mis à part le fragment de Matthieu). C'est un exemple typique du travail accompli par les copistes chrétiens primitifs. Ce fragment, qui compte une centaine de lettres grecques sur son recto et sur son verso, daterait en effet du deuxième siècle de notre ère. On nous dit à son propos que même s'il n'a pas été rédigé dans les formes voulues et ne peut prétendre à être d'une belle écriture, c'est néanmoins "un exemple de travail soigné". Chose intéressante, ce fragment provient d'un codex carré d'environ vingt centimètres de côté, qui contenait vraisemblablement tout l'évangile de Jean, soit quelque soixante six feuilles ou 132 pages au total.

Les papyrus bibliques de Chester Beatty, quoique de date plus récente, apportent un plus ample témoignage. Ce sont des fragments qui proviennent de onze codex grecs, rédigés entre le deuxième et le quatrième siècle de notre ère. Ils renferment des parties de neuf livres hébraïques et de quinze livres chrétiens de la Bible. Grâce à leur grande variété de styles, ils sont très représentatifs. L'un de ces codex passe pour être "l'œuvre d'un bon scribe professionnel". D'un autre, on reconnaît que "la rédaction par elle-même est très correcte, quoique d'une calligraphie quelconque, et l'œuvre d'un scribe compétent". Et d'un autre enfin: "La main est grossière mais en général correcte" (Papyrus bibliques Chester Beatty angl. vol. I).

Leur contenu est toutefois plus important que les caractéristiques que nous venons d'examiner, car, dans l'ensemble, ces fragments corroborent les manuscrits en vélin datant du quatrième siècle, dits "neutres" c'est-à-dire le Vaticanus 1209 et le Sinaiticus.

Chose essentielle cependant, ces manuscrits en papyrus viennent confirmer l'authenticité des textes existants. Aussi feu sir Frédéric Kenyon (archéologue, bibliste, administrateur et conservateur en chef du British Museum) déclarait-il à leur propos: "La conclusion première et essentielle qu'il faut tirer de leur examen, c'est qu'ils confirment l'exactitude rigoureuse des textes existants. Ils ne signalent de variante frappante ou fondamentale ni pour l'Ancien ni pour le Nouveau Testament. Il n'y a ni omission importante, ni adjonction de passages, ni variantes qui puissent modifier les faits et les doctrines essentiels. Les variantes dans le texte ne concernent que des questions secondaires, telles que l'ordre des mots et l'emploi du terme exact."

En réalité, même si les copistes chrétiens primitifs n'étaient pas des "sages au sens charnel", leurs oeuvres ne manquent ni de sagesse ni de sens pratique. Et bien que de nombreuses imperfections, peu graves il est vrai, se soient glissées dans leurs oeuvres parce qu’ils n'avaient pas reçu de formation professionnelle, ces hommes laissèrent des manuscrits parfaitement corrects et exempts d'interpolations grossières, grâce à leur méthode de travail consciencieuse et grâce au soin qu'ils apportèrent à reproduire le sens exact du texte à copier. Ce qui reste de leurs oeuvres contribue efficacement à asseoir l'authenticité des Écritures telles que nous les possédons de nos jours. Retour haut de page

 

Des manuscrits des Écritures grecques datant du 2ème siècle

Sur quoi se base-t-on pour dire qu'un manuscrit date du IIème siècle de notre ère? Porte-t-il une date en première page? En fait, les anciens manuscrits portent rarement une date, et là où elle existe, elle n'est pas toujours digne de foi. Même dans les livres modernes, la date de parution figure souvent uniquement sur la page du début, que cette page vienne à disparaître, et il sera difficile de dater le livre avec exactitude. Or le manuscrit ancien peut, dans ce cas, présenter des avantages par rapport au livre imprimé.

Il faudra recourir à la paléographie. Cette science pourra nous répondre grâce à un travail de recherches minutieuses dans le déchiffrement de l'écriture, la détermination des formes et du style. Il est bien connu que nos langues modernes ont subi des changements sensibles; il en était de même des langues des premiers siècles. C'est pourquoi il est possible, en comparant soigneusement des dizaines de nuances, d'arriver à dater un manuscrit à quarante ou cinquante ans près.

Des détails tels que l'insertion de petits espaces entre les mots, une ponctuation restreinte et diverses abréviations ont permis de délimiter certaines époques. A partir de papyrus non littéraires, tels que reçus, lettres, pétitions et contrats portant des dates précises, on a pu faire des tables où figurent des lettres typiques de l'alphabet. Ces tables sont une base précieuse pour la comparaison des anciennes écritures. Ainsi, dans le fragment de l'évangile de Jean, connu sous le nom international de P52, le copiste a terminé certains tracés par des crochets ou fioritures, il a omis certains signes et a employé un genre particulier de trait transversal; enfin, il a arrondi certaines lettres: ce sont là des habitudes propres aux copistes du IIème siècle.

Ainsi, un quart de siècle seulement sépare la copie la plus ancienne connue (datée de l'an 125-130 environ), qui est une portion (18:31-33 et 18:37-38) de l'évangile de Jean original (mis à part le papyrus Magdalen qui se rapporte à un fragment de l'évangile de Matthieu et qui serait encore plus ancien). Le fait qu'une copie circulait dans les années 125-130 en Égypte (où ce fragment a été découvert) confirme que l'original fut écrit bien avant. 

Même si les experts ne sont pas unanimes, la plupart d'entre eux déclarent qu'une douzaine de codex en papyrus datent du IIème siècle de notre ère. Sont particulièrement remarquables: le Papyrus Bodmer II (P66) et le Papyrus Bodmer XIV, XV (P75), écrits tous deux vers 200 de n. è. Le Papyrus Bodmer II contient une grande partie de l’Évangile de Jean, tandis que le Papyrus Bodmer XIV, XV renferme l’essentiel de Luc et de Jean et a un texte très proche du Vaticanus 1209.Vu qu'il s'agit de documents importants, tant par leur ancienneté que par leur forme de codex primitif, nous en donnons la liste.

Les manuscrits bibliques ont reçu des numéros qui sont reconnus dans le monde entier par les spécialistes. La liste des papyrus des Écritures grecques chrétiennes est connue sous le nom de "classification de Gregory-von Dobschütz", et celle des papyrus de la version des Septante, de la "classification de Rahlfs"; chacune d'elles porte en effet le nom de ses illustres auteurs. De plus, chaque manuscrit porte un nom de collection et un numéro indiquant le lieu de sa découverte et le nom de son possesseur actuel. Retour haut de page

 

Ère de la critique textuelle et affinage du texte

Grâce à l’invention de la presse à imprimer à caractères mobiles au XVème siècle et à la Réforme au début du XVIème siècle, l’intérêt pour le grec ressuscita. C’est au cours de cette période de la Renaissance, que le célèbre bibliste hollandais Érasme publia sa première édition d’un texte de référence du "Nouveau Testament" (un tel texte s’obtient par la comparaison méticuleuse d’un certain nombre de manuscrits et en choisissant les termes dont on s’accorde le plus généralement à reconnaître l’authenticité; ce texte de référence inclut souvent un appareil de notes présentant des leçons différentes données dans d’autres manuscrits).

Cette première édition fut imprimée à Bâle (Suisse) en 1516, un an avant le début de la Réforme qui vit le jour en Allemagne. La première édition contenait beaucoup d’erreurs, mais un texte amélioré fut présenté dans les éditions suivantes parues en 1519, 1522, 1527 et 1535. Érasme ne disposait que de quelques manuscrits en écriture cursive pour compiler et préparer son texte de référence.

Le texte grec épuré d’Érasme servit de fondement à de meilleures traductions en différentes langues d’Europe occidentale. Cela rendit possible la parution de translations de meilleures qualité que celles qui avaient été faites à partir de la Vulgate. Martin Luther, en Allemagne, fut le premier à utiliser le texte d’Érasme ; il acheva sa traduction des Écritures grecques chrétiennes en langue allemande en 1522. Puis ce fut l’Anglais William Tyndale qui, en dépit d’une violente persécution, travailla à une traduction en anglais sur la base du texte d’Érasme, traduction qu’il termina durant son exil sur le continent européen en 1525. L’Italien Antonio Brucioli traduisit le texte d’Érasme dans sa langue en 1530. Avec la parution du texte grec d’Érasme s’ouvrit l’ère de la critique textuelle, qui a pour objet de rétablir le texte de la Bible dans sa forme originale.

La Division en chapitres et versets. 

Robert Estienne, de Paris, fut un célèbre imprimeur et éditeur du XVIème siècle. La nature même de son travail lui fit voir l’intérêt pratique d’un système de division en chapitres et versets en vue de faciliter les recherches, système qu’il introduisit dans son édition gréco-latine du Nouveau Testament parue en 1551. La division en versets avait été instituée pour les Écritures hébraïques par les Massorètes, mais c’est la Bible française d’Estienne parue en 1553 qui introduisit l’actuelle division pour la Bible tout entière. Cette numérotation fut suivie dans les bibles de langue anglaise parues ultérieurement, et elle rendit possible l’élaboration de concordances, comme celle d’Alexandre Cruden, éditée en 1737, et les deux concordances exhaustives de "l’Authorized Version", celle de Robert Young, publiée pour la première fois en 1873 à Édimbourg, et celle de James Strong, éditée en 1894, à New York.

Le Textus Receptus. 

Robert Estienne a aussi publié plusieurs éditions du "Nouveau Testament" grec. Elles étaient essentiellement basées sur le texte d’Érasme, corrigé d’après la Polyglotte de Complute de 1522 et 15 manuscrits cursifs datant des quelques siècles précédents. En 1550, Estienne publia sa troisième édition du texte grec, qui devint le Textus Receptus (ou texte reçu) et qui servit de base à d’autres traductions anglaises du XVIème siècle ainsi qu’à la King James Version de 1611.

Textes grecs affinés. 

Par la suite, des hellénistes ont produit en nombre croissant des textes affinés. Citons celui, remarquable, de J. Griesbach qui a eu accès aux centaines de manuscrits grecs devenus disponibles vers la fin du XVIIIème siècle. La meilleure édition du texte grec de Griesbach complet fut publiée en 1796-1806. Son texte de référence servit de base à la traduction anglaise de Sharpe en 1840, et c’est le texte grec de l’Emphatic Diaglott qui parut en entier pour la première fois en 1864. D’autres textes excellents ont été produits par Konstantin von Tischendorf (1872) et Hermann von Soden (1910), le texte de ce dernier ayant servi de base à la version anglaise de Moffatt en 1913. Retour haut de page

 

Versions anciennes à partir du grec

À partir du XIVème siècle, on a traduit les Écritures grecques en langue hébraïque. L’intérêt de ces traductions réside dans le fait que certaines d’entre elles restituent le nom divin dans les Écritures chrétiennes.

Quand on pense que la plupart des textes des auteurs classiques ne sont authentifiés que par une poignée de manuscrits que des siècles séparent des écrits originaux, on se rend compte de l’abondance de preuves permettant d’attester la véracité du texte des Écritures grecques chrétiennes. Voir : La Bible est-elle toujours ce qu'elle était?

Sur ce site un thème entier est consacré aux versions.

 

Les variantes textuelles et leur signification

Il existe de nombreuses variantes textuelles dans les nombreux manuscrits des Écritures grecques chrétiennes (plus de 13 000). À eux seuls, les 5000 manuscrits en langue grecque en contiennent beaucoup. On comprend aisément que les copies faites à partir des manuscrits primitifs contenaient des fautes dues aux copistes. Quand l’un de ces manuscrits était envoyé dans une certaine région, les fautes reproduites dans les copies qui y étaient faites devenaient la caractéristique des manuscrits de cette région. C’est ainsi que se formèrent des familles de manuscrits similaires. Ne faut-il pas s’alarmer de ces milliers de fautes commises par les copistes ? Ne sont-elles pas le signe d’une infidélité dans la transmission du texte ? Certainement pas!

F. Hort, coéditeur du texte de Westcott et Hort, a écrit : " La grande majorité des mots du Nouveau Testament résistent à toutes les méthodes de la critique visant à relever des différences, parce qu’ils sont exempts de variation et n’ont besoin que d’être transcrits. [...] Si on met de côté les différences minimes, [...] les mots à notre avis encore sujets à caution constituent à peine plus de un millième de tout le Nouveau Testament. "

Valeur du texte transmis.

Après ces longs siècles de transmission, quel jugement porter sur le texte quant à sa fidélité et à son authenticité ? Non seulement des milliers de manuscrits peuvent être comparés, mais les découvertes de manuscrits bibliques plus anciens faites au cours des dernières décennies font remonter le texte grec à 125 de n. è. environ, soit une bonne vingtaine d’années après la mort de l’apôtre Jean vers 100 de n. è. Ces manuscrits sont le gage de l’authenticité de l’actuel texte grec affiné. 

Notez à quelle conclusion aboutit Sir Frederic Kenyon: «L’intervalle qui sépare la date de rédaction des manuscrits originaux de celle des documents les plus anciens que nous possédions devient si minime qu’il est en fait négligeable et que les dernières raisons permettant de laisser subsister un doute sur l’intégrité du texte qui nous est parvenu s’en trouvent désormais dissipées. L’authenticité et l’intégrité générale des livres du Nouveau Testament peuvent être considérées comme établies. L’intégrité générale cependant est une chose, et l’exactitude des détails en est une autre». Il appartient au restaurateur du texte de se préoccuper des détails.

Note : le texte des Écritures grecques chrétiennes (achevé au Ier siècle de notre ère) est étayé par des fragments de manuscrits du IIème siècle et par des manuscrits intégraux du IVème siècle. Selon Gerhard Kroll, il existe 81 papyrus datés du IIème au VIIème siècle, 266 manuscrits onciaux du IVème au Xème siècle, et 2 754 manuscrits cursifs du IXème au XVème siècle, ainsi que 2 135 lectionnaires. Tous ces documents viennent confirmer l’exactitude du texte des Écritures grecques chrétiennes, dont l’intégrité est on ne peut mieux établie.

Outre les manuscrits grecs, il est également possible aujourd’hui de se livrer à l’étude de nombreux manuscrits des Écritures grecques chrétiennes en d’autres langues. Il existe plus de 30 manuscrits (ou fragments) de versions de la Vieille Latine et des milliers de manuscrits de la Vulgate de Jérôme. Le New World Bible Translation Committee s’y est référé ainsi qu’aux versions copte, arménienne et syriaque.

Le texte des Écritures grecques chrétiennes est-il vraiment digne de foi? Tout à fait. Comparé à d’autres écrits de l’Antiquité, il est même d’une fiabilité exceptionnelle. Dans son livre, Auf den Spuren Jesu (Sur les traces de Jésus), Gerhard Kroll montre que l’on ne dispose aujourd’hui que de six manuscrits d’Aristote (philosophe grec du IVème siècle avant notre ère). Pour la plupart, ces papyrus remontent au mieux au Xème siècle. Les œuvres de Platon (IVème siècle avant notre ère) sont un peu mieux placées avec dix manuscrits, antérieurs au XIIIème siècle. Pour Hérodote (Vème siècle avant notre ère), on retrouve une vingtaine de fragments de papyrus à partir du Ier siècle de notre ère, tandis que les premiers manuscrits de ses œuvres complètes sont du Xème siècle. Quant aux plus anciens manuscrits de Flavius Josèphe, ils ne datent que du XIème siècle.

Ces documents originaux étaient divinement inspirés. En revanche, les copistes, quoique compétents, ne l’étaient pas (Ps. 45:1 ; 2 Pierre 1:20, 21 ; 3:16). Il a donc fallu filtrer le contenu du grand réservoir de copies manuscrites, afin de recueillir, sans doute possible, les eaux pures de la vérité telles qu’elles ont autrefois jailli de la Grande Source, Yahwah (Heb: Yehwah). Loué soit-il pour le don merveilleux de sa Parole, la Bible inspirée, et pour le rafraîchissant message du Royaume. Retour haut de page

 

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